Bilan de la session plénière du Parlement européen du 7 au 10 juin 20216 minutes de lecture

Une fois par mois, les députés européens se réunissent en session plénière afin de voter et discuter les nombreux actes législatifs, amendements et rapports sur lesquels ils travaillent en commissions. Les députés retrouvent Strasbourg après plus d’un an de séance à Bruxelles. Causons d’Europe vous propose aujourd’hui un tour d’horizon des principaux actes législatifs adoptés entre le 7 et le 10 juin 2021.

88 milliards d’euros pour le FSE +

Une partie des fonds européens atterrit dans le portefeuille des régions et départements des Etats membres. Il s’agit notamment du Fonds social européen, le FSE. Sa nouvelle formule « + » intègre également d’autres fonds jusqu’alors distincts. Il s’agit du programme pour l’emploi et l’innovation sociale, de l’initiative pour l’emploi des jeunes, du fonds aux plus démunis et donc, du FSE.

Le Parlement vient ainsi de donner son feu vert à l’utilisation des 88 milliards d’euros du FSE +, mobilisables entre 2021 et 2027. Ils seront prioritairement alloués à l’emploi, avec une priorité pour les jeunes, à l’éducation, à la santé et au logement.

Pass sanitaire et levée temporaire des brevets sur les vaccins

Une fois n’est pas coutume, parlons un peu de Covid. Ce qui semblait être l’exception il y a quelques mois est devenu la règle : pass sanitaire pour tout le monde. Pas de jaloux. Comme c’est le cas en France, les personnes pourront circuler d’un Etat membre à un autre cet été. A condition d’être vacciné, de présenter un test PCR négatif ou un test antigénique prouvant une contamination antérieure. Validé par le Parlement, ce pass entrera en vigueur le 1er juillet prochain. Et ce, pour douze mois. Notons au passage que les vaccins concernés sont ceux qui ont été validés par l’Agence européenne du médicament. Donc, pas de Sputnik V, ni de Sinopharm. Casse-tête à venir pour celles et ceux qui ont reçu ces doses, par exemple, une partie de la population hongroise. Y compris le Premier ministre Viktor Orban…

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Les parlementaires ont aussi remis sur la table – avait-il disparu ? – le débat autour de la levée des brevets sur les vaccins. Ils ont ainsi adopté une résolution demandant une levée temporaire de ces brevets. Objectif, accroître la production et ainsi distribuer les précieux sésames plus rapidement. Surtout dans les pays pauvres, qui ont reçu 0.3 % des doses produites. Le texte demande également plus de transparence sur les contrats signés entre la Commission et les laboratoires. Cela permettrait de répondre une bonne fois pour toute à une question cruciale : Comment la Commission a-t-elle négocié ?

Le Parlement contre la Commission

Dans la même veine, les eurodéputés sont vent debout contre la Commission au sujet du mécanisme de conditionnalité des aides européennes. Souvenez-vous. Fin 2020, il était question de conditionner les fonds du plan de relance au respect de l’Etat de droit par les Etats membres. Le feuilleton, fait de vetos et de négociations, s’était finalement conclu et le budget avait été voté. Le compromis adopté est le suivant :

  • La Commission, qui a établit l’existence d’une violation – pas un risque de violation -, propose d’utiliser ce mécanisme.
  • Le Conseil de l’Union européenne a un mois pour y donner suite. Sa décision est votée à la majorité qualifiée. C’est-à-dire qu’elle doit être adoptée par 65 % des Etats membres représentant 55 % de la population de l’Union.

Si violation il y a, fonds européens il n’y a plus. Mais aujourd’hui, les principaux concernés – Pologne et Hongrie – ont contesté ce mécanisme devant la Cour de justice de l’UE. De quoi alourdir un processus déjà extrêmement long. Rappelons que cela fait plusieurs années déjà que la Pologne est sous le coup du fameux article 7, pour existence d’un risque de violation des droits fondamentaux. Le Parlement a ainsi voté un texte pour poursuivre la Commission pour inaction dans ce domaine.

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Environnement et défense des animaux

Les parlementaires avancent en sentier battu au sujet de l’environnement. Les objectifs de protection de l’environnement ne sont toujours pas tenus – malgré une économie à l’arrêt plusieurs mois – et il faut donc une législation contraignante pour y parvenir. Cinq priorités à leurs yeux : usage des sols et des mers, exploitation des ressources, changement climatique, pollution et lutte contre certaines espèces exotiques envahissantes. Le Parlement européen propose ainsi de travailler sur des objectifs contraignants pour préserver la biodiversité. Le but étant de déboucher à un « accord de Paris » dans ce domaine. Espérons que si cet accord est conclu, il ne finira pas aux orties comme l’accord de Paris. D’autant que l’Union s’est fixée des objectifs ambitieux de réduction de la pollution : réduction des émissions de gaz à effet de serre de 55 % en 2050 par rapport aux niveaux de 1990.

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Au sujet de l’élevage, en revanche, ça avance. En 2018, plus d’un million de citoyens déposent une initiative européenne pour mettre fin à l’élevage en cage. Trois ans plus tard, le Parlement approuve cette demande et charge la Commission de formuler des propositions pour parvenir à cette fin. Certains Etats font déjà des efforts à ce sujet, mais l’intérêt d’une législation commune satisferait la sacro-sainte concurrence équitable des traités européens. Affaire à suivre.

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Un tour chez nos voisins

Quittons les Vingt-Sept pour rendre visite au voisin Biélorusse. Le détournement d’un avion européen pour arrêter un opposant au régime à Minsk a rappelé que les dix mois d’opposition à Alexandre Loukachenko n’avaient pas encore bousculé suffisamment les lignes. Alors, l’Union réfléchit. De nouveaux projets de sanctions arrivent sur la table. Le mondial de hockey s’est d’ores-et-déjà tenu ailleurs. Le Parlement propose de suspendre la Biélorussie d’autres compétitions sportives. Bon, est-ce que cela va empêcher le dernier dictateur d’Europe de dormir ? Pourquoi pas retourner sur le terrain économique, en attaquant les productions de pétrole et de bois ? A voir, des précédentes sanctions, de nature similaire, n’avaient rien donné. En tout cas, tout reste à faire.

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Terminons ce tour d’horizon par l’enclave espagnole de Ceuta, voisine du Maroc. Ces dernières semaines, plusieurs milliers de migrants ont cherché à se rendre dans cette enclave, en provenance du Maroc. L’hypothèse principale est la suivante. Un cadre du front Polisario (qui lutte pour l’indépendance du Sahara occidental, revendiqué par le Maroc) est soigné en Espagne. Les autorités marocaines auraient ainsi décidé de punir leurs homologues espagnoles en facilitant le passage de migrants vers leur territoire. Une pratique plus que contestable, que l’Union connaît bien, notamment avec la Turquie. Ces arrivées trop souvent banalisées en feront oublier l’essentiel : la question migratoire et loin d’être réglée.

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Âgé de 23 ans, Léo est l’un des trois fondateurs de Causons d’Europe. Ayant obtenu une licence d’Histoire et un master de Relations Internationales, il est actuellement en service civique chez Radio Campus Angers. Son dada ? Causer d’Europe avec celles et ceux qui ne disposent pas de beaucoup d’informations à ce sujet, voire n’en disposent pas ! Passionné par la politique, le sport, l’Europe et le monde, les mouvements sociaux, la presse indépendante … Il répond toujours présent pour exprimer son avis, de préférence à l’encontre des discours consensuels, et il se rapproche des lectrices et lecteurs pour s’assurer de sensibiliser le public le plus large possible.