Prendre le problème du terrorisme à la racine4 minutes de lecture

Ces dernières semaines, la France a à nouveau été frappée par le terrorisme islamiste et d’extrême-droite. Ces nouvelles attaques montrent à quel point les autorités n’ont toujours pas pris la mesure du problème terroriste. Ce matin, dans un entretien au Monde, le maire de Nice, Christian Estrosi, déclarait : « Aucun droit pour les ennemis du droit ». Fausse note. Pareille affirmation revient à dire que les terroristes ont gagné et que notre système démocratique dans lequel les hommes naissent libres et égaux en droits a perdu. La justice est la même pour tout le monde et doit le rester.

Vendredi 30 octobre au soir, sur le plateau de 28 minutes d’Arte, Judith Bernard a soulevé la question la plus fondamentale qu’il convient de se poser à chaque attentat -Pourquoi ? – Avant de se faire taxer d’islamogauchiste par Brice Couturier, oubliant que le terrorisme n’est pas monopolisé par les islamistes radicaux. Non, ce n’est pas de la complaisance que de chercher les causes de ces actes, mais plutôt une grande marque d’intelligence, cherchant la réponse avec recul plutôt que sous le coup de l’émotion. Etudier le terreau du terrorisme, c’est incontournable et prioritaire.

 En France, le terrorisme se développe chez les plus démunis, abandonnés par les pouvoirs publics depuis des années, sur lesquels on tape à longueur de journée par déclaration politique ou médiatique interposée. Un gamin ne peut pas être fier d’être Français lorsqu’il allume sa télé et qu’il entend des types vomir sur l’islam à longueur de journée. Comme si cette religion en particulier était la racine de tous les maux de notre société. Il ne peut pas aimer un pays où celles et ceux qui tiennent des propos de haine envers l’islam et arment idéologiquement la mauvaise graine xénophobe et raciste gangrènent l’espace médiatique et politique. Et aux lendemains d’attaques menées par des islamistes, comment peuvent-ils avoir l’envie, voire le courage de descendre dans la rue pour montrer qu’ils ne sont pas des soldats de Daech ou d’Al-Qaida, s’il savent déjà qu’il seront présentés comme tels ?

Cette fois encore, les leçons n’ont toujours pas été retenues. Le tapis rouge médiatique a été déroulé aux figures politiques de droite : Christian Estrosi sur Europe 1, Eric Ciotti puis Jean Messiha sur CNews, Manuel Valls sur LCI, Christian Jacob sur RTL, Marine Le Pen sur BFM. Bref, aucun universitaire, islamologue ou que sais-je pour apporter une pluralité d’opinions, nécessaire au débat. Et tout cela donne des idées malsaines aux pantins de l’extrême-droite identitaire et violente, convaincue à grands coups de discours de stigmatisation que leur Europe chrétienne était menacée par une vague migratoire qui représente, au total, moins de 5% de la population du continent.

Les solutions pour combattre le terrorisme ne sont certainement pas les bombardements de pays à dominante musulmane, la stigmatisation des quartiers les plus en galère, le renforcement de l’arsenal législatif ou un puissant système de renseignement. Mettons les pieds là où nous ne les mettons plus depuis des décennies, écoutons les habitants, questionnons nos politiques sociales, étrangères, la pluralité des opinions dans les médias. Condamnons au moins par les mots l’omniprésence de la rhétorique d’extrême-droite, qu’il s’agisse d’ « islamogauchisme » ou de « droits de l’hommismes ». Amenons de la contradiction dans les médias, des spécialistes qui savent de quoi ils parlent, qui iront vous expliquer les causes de la radicalisation et proposerons des solutions utiles, bien loin des lois liberticides et de la prolifération des caméras. La ville de Nice était équipée de 700 caméras en 2007, elle en compte 3 300 aujourd’hui, qui s’ajoutent aux bornes d’alerte, mais la menace terroriste y plane toujours. 

Non, le terrorisme, qu’importe sa nature, doit être compris comme un problème profondément ancré dans notre société. Et c’est tout le monde, du professeur d’histoire géo au curé en passant par le rabbin, l’imam et les adeptes des terrasses de bistrots, qui en fait les frais. 

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Âgé de 23 ans, Léo est l’un des trois fondateurs de Causons d’Europe. Ayant obtenu une licence d’Histoire et un master de Relations Internationales, il est actuellement en service civique chez Radio Campus Angers. Son dada ? Causer d’Europe avec celles et ceux qui ne disposent pas de beaucoup d’informations à ce sujet, voire n’en disposent pas ! Passionné par la politique, le sport, l’Europe et le monde, les mouvements sociaux, la presse indépendante … Il répond toujours présent pour exprimer son avis, de préférence à l’encontre des discours consensuels, et il se rapproche des lectrices et lecteurs pour s’assurer de sensibiliser le public le plus large possible.