Aux marges de l’Europe : l’Arménie et l’Azerbaïdjan en conflit4 minutes de lecture
Le conflit entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan autour de la région du Haut-Karabagh a repris fin 2020. Si les combats semblent loin du continent européen, l’Union et ses Etats membres y sont pleinement impliqués, notamment d’un point de vue humanitaire et diplomatique.
2020 : le réveil d’un conflit jamais éteint
L’Arménie et l’Azerbaïdjan sont deux Etats indépendants issus de la dissolution de l’URSS en 1991. Mais le tracé des frontières dans la région, opéré en partie par Staline, a maintenu des tensions communautaires. Ainsi, la région du Haut-Karabagh, à majorité arménienne et chrétienne, a été intégrée à l’Azerbaïdjan musulman. La région du Karabagh lutte depuis les années 1990 pour obtenir soit son indépendance, soit son rattachement à l’Arménie. Un premier conflit, achevé en 1994, fait 30 000 victimes.
Les incidents frontaliers n’ont jamais vraiment cessé. Mais en septembre 2020, le conflit repart. Comme souvent dans les conflits profonds, Arménie et Azerbaïdjan se renvoient la responsabilité de la reprise des combats. Le bilan humain est encore contesté, certaines sources parlent de 6 000 morts. Ce qui est sûr, c’est que l’Azerbaïdjan a remporté des gains territoriaux et que l’accord de paix, établi en novembre dernier, est encore fragile. Début mai 2021, les échanges de prisonniers se poursuivent mais la dispute autour de la présence de soldats azéris en territoire disputé est révélateur d’un équilibre instable.
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La présence européenne dans la région : diplomatie, aide humanitaire et partenariat oriental
Face au redémarrage du conflit, le groupe de Minsk a repris du service. Co-présidé par la Russie, les Etats-Unis et la France, ce format de négociations participe aux tentatives d’installer la paix entre les deux Etats. L’Allemagne, l’Italie, les Pays-Bas, le Portugal et la Finlande en sont membres. La Turquie également, elle qui a soutenu ouvertement l’Azerbaïdjan. A l’échelle européenne, les Vingt-Sept se sont prononcés à travers des déclarations condamnant les violences et ont fourni une aide humanitaire.
Cette aide à l’Arménie cumule à 17 millions d’euros depuis septembre 2020. Elle consiste en des livraisons de nourriture, de produits d’hygiène, des soins de santé. En revanche, fait moins habituel, elle s’implique dans les opérations de déminage.
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Les liens entre l’Union et la région existent en dehors des conflits. L’Arménie et l’Azerbaïdjan sont membres du partenariat oriental lancé en 2009. Objectif, renforcer les liens économiques et rapprocher les six pays du partenariat – la Biélorussie, l’Ukraine, la Géorgie et la Moldavie complètent le partenariat – des traits européens. A ce titre, les « 20 objectifs pour 2020 » sont proches des critères d’adhésion à l’Union : pluralité médiatique, économie libérale, Etat de droit, lutte contre la corruption. Ce partenariat n’est pas uniquement économique, il est aussi géopolitique. Il s’agit, pour l’Union, d’accroître son influence là où la Russie cherche à garder ses liens.
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L’importation du conflit sur le sol européen : le cas français
Loin de rester cantonné à la région et son voisinage, le conflit a rapidement pris une dimension internationale par l’implication d’autres Etats. Mais on l’a aussi retrouvé sur le continent européen, notamment en France. Les oppositions entre les autorités françaises et turques étaient bien visibles. D’un côté, R. Erdogan, qui soutenait fermement l’Azerbaïdjan. De l’autre, E. Macron s’est davantage positionné en médiateur du conflit. Il a toutefois désigné les autorités azéries comme responsables de la reprise des hostilités et accusé la Turquie d’envoyer sur place des mercenaires. Une grande partie du personnel politique français a explicitement manifesté son soutien à l’Arménie.
Le conflit a enfin touché le pays à travers de nombreuses manifestations de la communauté arménienne et ses soutiens. Certaines associations de la droite nationaliste et identitaire ont organisé des levées de fonds en soutien à l’Arménie. Un soutien d’ailleurs affiché comme la protection du « dernier bastion chrétien d’Orient ». La quasi-totalité des manifestations de sont déroulées dans le calme. Cependant, d’inquiétants troubles se sont déroulés à Décines-Charpieu, commune proche de Lyon. Plusieurs centaines de membres de la communauté turque française ont défilé dans un quartier de la ville dans lequel vivent des Arméniens, prêts à les tabasser. Une situation qui a fait ressortir la question du génocide arménien de 1915, opéré par les autorités turques de l’époque. La France a reconnu le génocide en 2001 et a instauré des commémorations annuelles en 2019. Le régime turc nie quant à lui cette vérité historique.
Âgé de 23 ans, Léo est l’un des trois fondateurs de Causons d’Europe. Ayant obtenu une licence d’Histoire et un master de Relations Internationales, il est actuellement en service civique chez Radio Campus Angers. Son dada ? Causer d’Europe avec celles et ceux qui ne disposent pas de beaucoup d’informations à ce sujet, voire n’en disposent pas ! Passionné par la politique, le sport, l’Europe et le monde, les mouvements sociaux, la presse indépendante … Il répond toujours présent pour exprimer son avis, de préférence à l’encontre des discours consensuels, et il se rapproche des lectrices et lecteurs pour s’assurer de sensibiliser le public le plus large possible.