Bilan de la session plénière du Parlement européen du 8 au 11 mars5 minutes de lecture

Une fois par mois, les députés européens se réunissent en session plénière afin de voter et discuter les nombreux actes législatifs, amendements et rapports sur lesquels ils travaillent en commissions. La pandémie de Covid-19 maintient les parlementaires à Bruxelles, mais, en temps normal, les sessions se déroulent à Strasbourg. Causons d’Europe vous propose aujourd’hui un tour d’horizon des principaux actes législatifs adoptés entre le 8 et le 11 mars 2021.

Droits des femmes et protection des minorités sexuelles

C’était l’événement de société du début de la semaine, le 8 mars, Journée internationale des droits des femmes. En écho à un rapport publié par la Commission, David Sassoli, Président du Parlement européen, a fait part de ses préoccupations, estimant que « la pandémie risque d’effacer des décennies de conquêtes issues des luttes des femmes européennes sur le droit au travail, le partage des soins, l’autonomie, le respect et le droit de faire leurs propres choix ». Les parlementaires ont par ailleurs rappelé que certains Etats membres n’avaient pas ratifié la Convention d’Istanbul sur la prévention et la lutte contre les violences à l’égard des femmes. Signée en 2011, elle n’a pas été ratifiée par la suite par la Bulgarie, la Hongrie, la Lettonie, la Lituanie, la République tchèque et la Slovaquie.

Dans une résolution, les Parlementaires ont appelé la Commission à employer tous les moyens dont elle dispose pour mettre fin aux dérives  de certaines régions polonaises qui se sont proclamées « libres de l’idéologie LGBTQI ». Le tableau est similaire en Hongrie, où les autorités ont récemment fait passer des amendements limitant considérablement les droits des minorités sexuelles. Si les eurodéputés ont proclamé l’Union « zone de liberté LGBTQI », des actes devront nécessairement succéder aux paroles : des procédures d’infraction, le fameux article 7 qui prévoit des sanctions en cas de violation de l’Etat de droit – déjà utilisé depuis plusieurs années sans effet réel – sont sur la table. Mais sans contraintes juridiques, on voit mal comment la situation pourrait s’améliorer.

Vers un commerce plus respectueux de l’environnement et des droits de l’Homme

Les Parlementaires ont présenté une résolution suggérant la mise en place d’une imposition sur le carbone issu des importations de certains produits provenant des pays tiers. Il s’agit d’inciter les entreprises polluantes à décarboner leur production. Cela permettrait en théorie de tendre vers les objectifs prévus par les Accords de Paris sur le climat et d’amener de l’argent dans les caisses de l’Union. L’argent récolté par cette taxe serait alloué au Pacte Vert européen, présenté l’été dernier, qui ambitionne de faire de l’Union le premier ensemble de pays neutre en émissions de carbone et de réduire de 60% les émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030.

Dans la même veine, un rapport d’initiative législative a été présenté afin de mettre rapidement au point une législation contraignante à destination des entreprises. Objectif, les tenir responsable en cas d’atteinte à l’environnement et aux droits de l’Homme, du travail, ou de corruption. L’aspect contraignant de cette législation, si elle voit le jour, est indispensable pour sanctionner les mauvaises pratiques. En filigrane, ce sont bien sûr les entreprises utilisant la main-d’œuvre Ouïghoure, corvéable à merci, qui sont visées.

Les médias menacés en Hongrie, en Pologne et en Slovénie

Nouvelle série d’attaques pour les médias en Europe, en particulier dans trois Etats qui ont malheureusement coutume de faire parler d’eux dans le domaine de la liberté de la presse. Les eurodéputés ont en effet appelé la Commission à faire plus en termes de protection des journalistes dans l’Union et – une fois de plus – à activer le mécanisme de sanctions prévu par l’article 7 TUE, qui pourrait par exemple priver Hongrie et Pologne de leur droit de vote au Conseil de l’Union.

  • En Hongrie, KlubRadio, station très critique envers les autorités hongroises, s’est vue refuser l’attribution d’une fréquence d’émission. Le paysage médiatique indépendant hongrois perd une radio emblématique, dans un pays où 80% des médias sont contrôlé par l’Etat.
  • En Pologne, une cinquantaine d’organes de presse s’est levée contre la future introduction d’une taxe publicitaire mettant en danger les médias qui ne sont pas encore contrôlés par l’Etat. A titre d’exemple, le groupe de presse Polska Press a été racheté. Ce sont désormais 20 quotidiens régionaux, 50 hebdomadaires et plusieurs centaines de sites qui sont sous contrôle du parti Droit et Justice. (voir aussi, à ce sujet, notre entretien réalisé avec Jacek Rewerski).
  • En Slovénie, c’est le Premier Ministre Janez Jansa qui est directement visé, en raison de tweets et déclarations hostiles à l’égard des journalistes.

International : conflit syrien et violations des droits de l’Homme

Le Parlement européen vient d’ajouter une nouvelle résolution exprimant ses inquiétudes vis-à-vis de la situation en Syrie. Voilà presque dix ans que le pays est en proie à un conflit qui a vu l’utilisation d’armes chimiques par le régime de Bachar Al-Assad et autres atrocités de guerre, l’intervention de nombreuses puissances internationales (la Turquie et la Russie notamment). L’Union elle, a été et est toujours absente. Ce texte s’ajoute finalement à la longue liste de résolutions sans effet et des conflits au cours desquels l’Union n’est pas intervenue de quelques manière que ce soit, de façon significative.

Pour conclure, une dernière résolution répertoriant trois violations des droits de l’Homme dans le monde :

  1. L’ambassadeur italien Luca Attanasio a été assassiné dans l’Est de la République démocratique du Congo, une région isolée, dans laquelle s’affrontent de nombreux groupes armés.
  2. Au Cambodge, rappel pour les autorités qui continuent à réprimer toute forme d’opposition – syndicalistes, défenseurs des droits de l’Homme, médias – par divers moyens : poursuites judiciaires, harcèlement, emploi de la force dans les manifestations pacifiques.
  3. Au Bahreïn, monarchie pétrolière de la péninsule arabique,  la situation des droits de l’Homme se dégrade sans cesse depuis le Printemps Arabe de 2011 : peine de mort régulièrement appliquée, refus d’exercice de la liberté d’association, d’expression de réunion.
Plus de publications

Âgé de 23 ans, Léo est l’un des trois fondateurs de Causons d’Europe. Ayant obtenu une licence d’Histoire et un master de Relations Internationales, il est actuellement en service civique chez Radio Campus Angers. Son dada ? Causer d’Europe avec celles et ceux qui ne disposent pas de beaucoup d’informations à ce sujet, voire n’en disposent pas ! Passionné par la politique, le sport, l’Europe et le monde, les mouvements sociaux, la presse indépendante … Il répond toujours présent pour exprimer son avis, de préférence à l’encontre des discours consensuels, et il se rapproche des lectrices et lecteurs pour s’assurer de sensibiliser le public le plus large possible.