Où en est le Parquet européen ?4 minutes de lecture

Le Parquet européen vient de rejeter sept des dix candidatures déposées par la Bulgarie aux postes de procureurs. En cause, selon une source d’Euractiv, des candidatures non satisfaisantes pour cette nouvelle juridiction européenne toujours en construction.

Un projet lancé il y a plus de vingt-cinq ans

La création du Parquet européen avait franchi un pas en 2019, au moment où la procureure roumaine Laura Kövesi venait d’être nommée procureure en chef dudit Parquet. Cette étape bien sûr fondamentale résulte d’une réflexion menée dès 1995. Cette année, un groupe d’experts étudie la possibilité de protéger les intérêts financiers de l’Union au sein d’un espace juridique européen. En 2001, dans un livre vert – document de travail de la Commission sur un sujet en particulier -, la Commission propose la création d’un poste de procureur européen.

A partir de là, le mécanisme est lancé : les traités de Lisbonne fournissent la base juridique du Parquet et en 2013, ses procédures et compétences sont définies dans une proposition de règlement. Quatre ans plus tard, en 2017, le règlement mettant en œuvre le Parquet européen est adopté. C’est par une coopération renforcée qu’est en partie né le Parquet européen.

Notons toutefois que les Vingt-Sept ne se sont pas ensuite greffés à cette nouvelle juridiction. La Hongrie, la Pologne et la Suède ne le souhaitent pas, tandis que le Danemark et l’Irlande appliquent leur clause d’ « opt-out ». C’est-à-dire qu’ils ne souhaitent pas participer au Parquet mais n’empêcheront pas sa création. Des clauses similaires existent pour les accords de Schengen, l’Union économique et monétaire ou la charte des droits fondamentaux.

Le rôle du Parquet européen : traquer les fraudes

Basé à Luxembourg, le Parquet européen a charge de mener des enquêtes et de juger les crimes liés principalement à la fraude de grande ampleur (plus de 10 000 euros) à la TVA, le blanchiment d’argent, le détournement de fonds européens, la criminalité organisée et la corruption. Il complète et appuie le travail des juridictions nationales existantes. Comme c’est le cas pour tous les textes législatifs communautaires, les compétences du Parquet européen doivent être transposées dans les droits nationaux. Ainsi, depuis juillet 2019, les vingt-deux Etats impliqués dans le Parquet doivent transposer la directive PIF dans la législation nationale.

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A l’échelle de l’Union, il doit permettre de mener des enquêtes par-delà les frontières des Etats membres et compléter l’OLAF, l’Office européen de lutte anti-fraude, Eurojust – agence européenne de coopération judiciaire – et Europol – lutte contre le terrorisme et la grande criminalité – dont les pouvoirs sont trop restreints pour mener des travaux de cette envergure et poursuites les suspects.

Laura Kövesi, une procureure générale exigeante à la tête d’une institution déjà en pagaille

L’actuelle procureure en chef du Parquet européen s’est distinguée dans sa lutte contre la corruption en Roumanie. Réputée crainte  des fraudeurs en raison de sa détermination, elle hérite finalement d’une nouvelle institution encore en travaux et dont la mise en œuvre sera plus complexe qu’elle n’y paraissait sur le papier.

Elle le reconnaissait volontiers dans le Rapport Schuman sur l’Etat de l’Union de l’année 2020, avec plusieurs points essentiels à régler pour assurer le bon fonctionnement du parquet, tant sur la transposition de la directive PIF, l’approbation des procureurs européens ou l’administration. La pandémie de Covid-19 n’a d’ailleurs pas arrangé les choses. Plus récemment, Laura Kövesi a dénoncé un manque de moyens humains et financiers : seulement 4 juristes pour traiter le fond des dossiers arrivant à Luxembourg et 13 millions d’euros de budget, là où elle en demande environ 40 millions. Cela fait déjà beaucoup de problèmes à corriger pour une institution à peine lancée.

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Âgé de 23 ans, Léo est l’un des trois fondateurs de Causons d’Europe. Ayant obtenu une licence d’Histoire et un master de Relations Internationales, il est actuellement en service civique chez Radio Campus Angers. Son dada ? Causer d’Europe avec celles et ceux qui ne disposent pas de beaucoup d’informations à ce sujet, voire n’en disposent pas ! Passionné par la politique, le sport, l’Europe et le monde, les mouvements sociaux, la presse indépendante … Il répond toujours présent pour exprimer son avis, de préférence à l’encontre des discours consensuels, et il se rapproche des lectrices et lecteurs pour s’assurer de sensibiliser le public le plus large possible.