L’Union prolonge et adapte EUCAP, sa mission civile au Mali4 minutes de lecture

Le Conseil de l’Union européenne a annoncé début janvier 2021 la prolongation de la mission EUCAP que mène l’Union au Mali, dans le cadre d’un conflit qui s’y déroule depuis 2012. Entamé en 2015, le soutien de l’Union pour stabiliser le pays et plus globalement la région s’étendra au minimum jusqu’en 2023.

Un conflit résultant de la chute du régime du colonel Kadhafi en Libye

Le Mali est entré dans un conflit sanglant qui a coûté la vie à plusieurs milliers de civils et militaires depuis la fin des années 2010. Son déclenchement résulte de l’intervention principalement franco-britannique qui s’était déroulé quelques mois plus tôt en Libye. Le régime du colonel Kadhafi employait dans son armée de nombreux mercenaires Touaregs. Ceux-ci étaient également présents en Algérie, au Niger, au Mali, et au Burkina Faso. Lorsque Kadhafi est tué, ces mercenaires sont chassés de Libye et cherchent à s’installer au Mali. On parle ici d’un contrecoup géopolitique, c’est-à-dire que la déstabilisation du Mali est une conséquence du conflit libyen qui l’a précédé.

Aujourd’hui, les Touaregs ont pris le contrôle du Nord du Mali. Largement soutenus par les groupes islamistes voisins, ils souhaitent faire sécession. L’Etat indépendant tel qu’ils l’imaginent servirait à organiser des attaques terroristes contre des cibles principales, dont la France.

La mission EUCAP Mali

L’Union européenne est peu engagée sur le plan militaire au Mali et dans la région du Sahel. Elle s’est engagée depuis 2015 dans la mission civile EUCAP Sahel Mali, afin d’aider les forces maliennes à « réaffirmer l’autorité du gouvernement sur l’ensemble du pays ». Concrètement, l’Union assiste et conseille la police, la gendarmerie et la garde nationale. Enfin, elle organise la coopération avec les acteurs internationaux présents, notamment la MINUSMA, la mission de l’ONU présente au Mali.

Pour 2021, le Conseil de l’Union a déclaré la prolongation d’EUCAP jusqu’au 31 janvier 2023. 89 millions d’euros seront mobilisés pour sa mise en œuvre. La mission sera dotée d’un nouveau mandat dans les actions précédentes et met également l’accent sur la coopération entre les pays du G5 Sahel (Burkina Faso, Mauritanie, Niger, Tchad, Mali), qui interviennent majoritairement sur le terrain militaire. Le nouveau chef de mission est un général de police française, Hervé Flahaut.

L’Union est également engagée dans deux autres missions dans la région : EUTM Mali (formation des armées maliennes) et EUCAP Sahel Niger (lutte contre la criminalité organisée et le terrorisme au Niger).

La France isolée ?

Si l’Union est surtout présente dans la formation de l’armée et des forces de l’ordre maliennes, la France intervient militairement depuis le 11 janvier 2013, date de l’allocution du président François Hollande annonçant l’arrivée des troupes françaises au Mali. Les opérations Barkhane et Serval ont mobilisé 5 000 hommes. Aujourd’hui, elles sont complétée par la task force Takuba. Le contingent a été porté à 5 100 soldats et le bilan militaire français s’élève à 49 victimes. C’est un dossier délicat pour les autorités françaises, qui doivent à la fois ne pas tomber dans le néocolonialisme en intervenant en Afrique et être exemplaire. Voilà plusieurs jours que les troupes françaises sont accusées d’avoir tué des civils maliens lors d’une frappe visant les djihadistes.

L’Union elle, dépêche 240 militaires de l’Eurocorps , ce qui est dérisoire pour une organisation rassemblant vingt-sept Etats. Cet échec de la mobilisation européenne force l’Etat français à assumer seul le coût d’une guerre (2 millions d’euros par jour, selon Le Canard Enchaîné) pour l’Europe, qui est une cible à part entière. L’Exemple malien est un nouveau cas de figure dans les échecs de la politique étrangère et de défense européenne. Au sein des Vingt-Sept, certains Etats ne souhaitent pas s’impliquer dans des conflits, les pays scandinaves particulièrement. D’autres ajoutent le poids de l’Histoire dans la balance, considérant qu’il revient à la France d’intervenir dans sa sphère d’influence africaine. Dans tous les cas, il y a fort à parier qu’il faudra plus de deux ans pour sortir de ce conflit, même si Emmanuel Macron envisage un retrait d’une partie d’un contingent, qui redescendrait à 4 500 hommes. Le Mali pourrait devenir alors, à moindre échelle, ce que l’Afghanistan et l’Irak ont été pour les Etats-Unis : des bourbiers militaires coûtant monnaie et vies humaines, suite à une intervention en Libye qui visiblement, n’avait pas pensé au contrecoup.

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Âgé de 23 ans, Léo est l’un des trois fondateurs de Causons d’Europe. Ayant obtenu une licence d’Histoire et un master de Relations Internationales, il est actuellement en service civique chez Radio Campus Angers. Son dada ? Causer d’Europe avec celles et ceux qui ne disposent pas de beaucoup d’informations à ce sujet, voire n’en disposent pas ! Passionné par la politique, le sport, l’Europe et le monde, les mouvements sociaux, la presse indépendante … Il répond toujours présent pour exprimer son avis, de préférence à l’encontre des discours consensuels, et il se rapproche des lectrices et lecteurs pour s’assurer de sensibiliser le public le plus large possible.