Visite à Bruxelles et discussions avec les autorités grecques : la Turquie et l’Europe renouent avec le dialogue4 minutes de lecture
Après plusieurs mois de tensions et d’escalade militaire et diplomatique – tensions migratoires, visite d’Erdogan à Chypre-Nord, explorations gazières en Méditerranée, provocations verbales -, les autorités turques avaient annoncé il y a quelques semaines souhaiter resserrer des liens devenus assez détendus avec leur voisin européen. En fin de semaine dernière et lundi 25 janvier, deux rencontres se sont déroulées en ce sens. La première à Bruxelles avec Josep Borrell, le patron de la diplomatie européenne, la seconde, à Istanbul, avec les autorités grecques.
A Bruxelles, relancer la confiance perdue ces derniers mois
Le ministre turc des affaires étrangères, Mevlüt Çavuşoğlu, s’est rendu à Bruxelles les 21 et 22 janvier dernier. Il y a rencontré tout le gratin diplomatique, notamment Josep Borrell, Charles Michel, président du Conseil européen et Jens Stolenberg, qui est à la tête de l’OTAN. Finalement, presque autant de personnages politiques que de tensions récentes entre l’Union et la Turquie. Souvenez-vous. En février, Erdogan organisait le passage volontaire de demandeurs d’asile et de réfugiés vers l’Europe pour que l’Union le laisse agir dans le conflit syrien, à savoir, combattre les Kurdes, un peuple sans Etat. Tout l’été, il a été question d’ingérence de la Turquie dans le conflit libyen, de non-respect de l’embargo sur les armes qui frappe ce même pays et d’une importante escalade avec le président français Emmanuel Macron, les échanges frôlant parfois l’insulte. L’Union européenne s’est engagée à accepter cette « main tendue » que lui présente les autorités turques, mais qu’elle ne passerait pas l’éponge sur ces différents incidents. A voir comment la diplomatie européenne pourra-t-elle s’employer, elle qui n’a, jusqu’alors, dit mot ni même agit pour freiner les ambitions du président Erdogan dans le voisinage immédiat de la Turquie. Le régime mondial de sanctions dont elle s’est dotée fin 2020, serait un bien maigre instrument diplomatique.
Mais les tensions entre l’Union et la Turquie, tout comme les tentatives de rapprochement, ne datent pas d’hier. Elles sont toutes deux liées par divers accords, par exemple, une union douanière, depuis 1999. La Turquie a cependant déposé une candidature d’adhésion à l’Union en 1987. Très peu d’évolutions ont été constatées depuis, et tant que la Turquie ne remplira pas des critères d’adhésion fondamentaux, tels le respect de l’Etat de droit ou des minorités. Ces manquements ont à nouveau été démontrés récemment, par la répression de militants LGBT.
A Istanbul, désamorcer la crise des explorations gazières
Le second épisode de ces rencontres diplomatiques s’est cette fois-ci déroulé à Istanbul, en Turquie, entre des représentants des autorités turques et grecques, en attendant le match retour à Athènes. Il s’agissait ici de régler l’épineux dossier des explorations gazières par la Turquie en Méditerranée. Fin 2020, comme nous l’avions publié le 11 décembre, cela faisait plusieurs mois que la Turquie envoyait régulièrement un navire de reconnaissance d’hydrocarbures en recherche de gaz, à proximité immédiate de la Grèce et de Chypre. Or, ces eaux « appartiennent » à ces États au regard du droit international maritime. On parle de zone économique exclusive, la ZEE, dans lesquelles s’appliquent les droits grec et chypriote. Ces entreprises de forages sont donc illégales et parfaitement condamnables.
Dans un article du Monde, Nabil Wakim détaille les raisons de l’intérêt que la Turquie porte sur ce gaz : le gaz est une ressource clé dans la transition énergétique car de plus en plus utilisé et la Turquie importe la quasi-totalité du gaz qu’elle consomme. C’est d’ailleurs pour cela qu’elle s’est également positionnée dans le conflit libyen, pour espérer faire main basse sur une partie des importances ressources gazières présentes dans la ZEE libyenne.
L’importance de cette rencontre mérite toutefois d’être relativisée. Certes, c’est la première fois depuis 2016 que Grèce et Turquie discutent autour de la même table. Mais ce n’est pas la première réunion de ce type, les soixante réunions précédentes ayant déjà porté sur cette question. Par ailleurs, l’AFP signale que « les deux pays n’avaient même pas réussi à se mettre d’accord sur la liste des sujets à aborder lundi ». Un signe qui montre que la route est encore longue vers le règlement de cet ensemble de dossiers, tous complexes et essentiels.
Âgé de 23 ans, Léo est l’un des trois fondateurs de Causons d’Europe. Ayant obtenu une licence d’Histoire et un master de Relations Internationales, il est actuellement en service civique chez Radio Campus Angers. Son dada ? Causer d’Europe avec celles et ceux qui ne disposent pas de beaucoup d’informations à ce sujet, voire n’en disposent pas ! Passionné par la politique, le sport, l’Europe et le monde, les mouvements sociaux, la presse indépendante … Il répond toujours présent pour exprimer son avis, de préférence à l’encontre des discours consensuels, et il se rapproche des lectrices et lecteurs pour s’assurer de sensibiliser le public le plus large possible.