UEFA – La fin du Fair-play financier ?4 minutes de lecture

Crise sanitaire, crise financière, pression des clubs… L’addition des difficultés pour les clubs européens a poussé l’Union des Associations Européennes de Football (UEFA) à céder du terrain en envisageant la suppression du fair-play financier pour soulager la pression sur les clubs européens.

La réforme Platini

C’est au mois de mai 2010 qu’est adoptée la réforme du Fair-play financier (FPF). Cette dernière répondait à l’augmentation significative des dépenses des gros clubs européens en quête de succès. Problème : les dépenses étaient généralement bien plus conséquentes que les revenus. La nouvelle réforme avait donc pour ambition d’imposer un principe : interdiction de dépenser plus que ce qui est gagné. Des sanctions avaient été décidées pour les clubs qui outrepasseraient cette mesure. Les clubs de l’AC Milan de Trabzonspor en ont fait les frais en étant interdits de participer aux compétitions européennes respectivement en 2019/2020 et 2020/2021. Le prestigieux club de Manchester City, abonné à la qualification en Champion’s League, a également écopé d’une condamnation, annulée par le Tribunal Arbitral du Sport.

Mis en application à partir de 2011, le Fair-play financier était une réforme qui tenait à cœur de Michel Platini, président de l’UEFA à l’époque. Elle devait permettre de limiter les investissements massifs des actionnaires des clubs, et ainsi de maintenir une égalité relative entre les « gros » clubs européens possédés par des investisseurs étrangers, et les clubs « moindres » vivant sur leurs propres deniers.

La pression des lobbys du Football

Les clubs de football européens n’appréciaient guère le Fair-Play Financier. Ce dernier les empêchait notamment de procéder à des achats de joueurs particulièrement onéreux. A noter que la fronde contre le Fair-Play Financier était menée par Andréa Agnelli, président de l’Association Européennes des Clubs (ECA), et président de la Juventus de Turin. C’est vraisemblablement son engagement auprès du club italien qui l’a poussé pendant toutes ces années à réclamer un allègement des mesures du Fair-Play Financier. Notons que si le FPF avait été appliqué strictement lors de la saison 2019/2020, la Juventus de Turin aurait vu sa participation aux compétitions européennes interdite pour la saison en cours, tout comme le FC Barcelone.

La crise économique liée à la crise sanitaire amène également son lot de conséquences pour les clubs européens. Mais n’a-t-elle pas constitué le motif idéal pour enterrer définitivement le Fair-Play Financier ? Probablement. Cependant, le règlement du FPF prévoyait un allègement des sanctions en cas de force majeure. En effet, l’annexe XI prévoit que « dans le cadre de son examen, l’Instance de contrôle financier des clubs de l’UEFA peut également prendre en compte des événements extraordinaires ou des circonstances qui échappent au contrôle du club qui sont considérés comme des cas de force majeure ». A croire que l’ECA a fait l’impasse sur cette annexe…

Si l’on prend le cas de la France, la baisse des recettes liée à l’interdiction d’accueillir des supporters et à la crise des droits TV (NDLR : échec de la chaîne Téléfoot en janvier 2021) est conséquente. Désormais, l’UEFA doit réfléchir à de nouveaux leviers pour éviter les dérives, et empêcher les investisseurs étrangers d’exploser les dépenses des clubs sans limitation.

Les perspectives de réformes

La suppression du Fair-Play Financier n’est pas unilatérale. En effet, le comité exécutif de l’UEFA qui se réunit le 19 avril prochain devrait décider de mesures alternatives. Si aucune date n’est encore fixée pour faire entrer en vigueur la réforme du FPF, le président de l’UEFA, Alexandr Ceferin souhaiterait boucler le dossier avant la saison prochaine.

Les nouvelles règles devraient permettre une plus grande flexibilité ; plus de restrictions dans les périodes de croissance économique, moins de sanctions dans les périodes de crise ou de décroissance. Dans les propositions évoquées pour mettre en œuvre ces nouvelles règle, un contrôle des masses salariales est évoqué. Ainsi, l’UEFA envisagerait de taxer une masse salariale qui excèderait un certain seuil (non défini). Plus d’interdictions de participation aux compétitions européennes donc, mais plutôt des compensations financières.

Les tractations sont toujours en cours entre l’UEFA et l’ECA pour trouver un compromis qui permettrait à l’instance européenne d’éviter les dérives mais qui n’empêcherait pas les clubs européens d’investir à perte sans risquer une exclusion des compétitions européennes. Une chose est certaine : le paysage footballistique en sera grandement changé. Affaire à suivre.

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Diplômé d’un master en archivistique à 23 ans, Victor est archiviste itinérant en Bretagne. En parallèle, il occupe son temps avec du sport, de la lecture, mais rédige également quelques articles pour Causons d’Europe depuis les quasi-débuts. Son intérêt pour l’écologie et la cause animale vont généralement de pair avec les sujets traités dans ses articles.