Restriction de l’accès à l’IVG : la pilule ne passe pas pour les Polonaises2 minutes de lecture

Alors que la Pologne est un des pays européens à la législation la plus restrictive en matière d’accès à l’IVG, son gouvernement a voulu resserrer la vis le 22 octobre en interdisant l’avortement en cas de malformation grave du fœtus.

 

La réélection du Président Andrzej Duda le 12 juillet dernier a permis au parti Droit et Justice (PiS) de continuer ses politiques ultra-conservatrices. Le Tribunal Constitutionnel, composé en majorité de membres du même parti, a voté une mesure qui rend l’avortement en cas de malformation du fœtus anticonstitutionnel. À l’annonce de cette décision, des centaines de milliers de Polonaises et Polonais sont descendus dans les rues des grandes villes. Slogans féministes, anticléricaux et antigouvernementaux ont grondé plusieurs soirs d’affilée. Face à l’ampleur des contestations, qui ont duré plus de deux semaines et paralysé le pays, le gouvernement a décidé de faire invalider la mesure, non sans embarras, entre contestation générale de son pouvoir et le souhait de satisfaire les idéaux de la partie la plus réactionnaire de son électorat.

Ce n’est pas la première fois que le gouvernement tente de modifier la législation en matière d’accès à l’IVG dans le pays. 100 000 femmes vêtues de noir sont descendues dans les rues des grandes villes en 2016 suite à la tentative du PiS, à l’époque au pouvoir depuis une année, de mettre en place son projet de loi «Stoppons l’avortement». Un autre passage de la loi en 2018 n’a pas été fructueux non plus.

Un droit à l’IVG et à la contraception initialement très limité

Depuis 2017, il n’est déjà plus possible de se procurer librement la pilule du lendemain dans le pays sans ordonnance et le droit à l’avortement est restreint aux seuls cas de viol, inceste et risque de mise en danger de la vie de la mère ainsi qu’en cas de malformation irréversible du fœtus depuis 1993. La décision du Tribunal Constitutionnel polonais menaçait donc ce dernier cas de figure qui concerne plus de 95% des avortements pratiqués dans le pays.

Les associations féministes dénoncent également le parcours semé d’embûches pour accéder à la contraception. Médecins et pharmaciens refusent de délivrer la pilule contraceptive et la pilule du lendemain, usant de leur clause de conscience. Même schéma quand il s’agit d’une demande d’IVG.

Dans les années 1980, on comptait en moyenne 130 000 avortements pratiqués  par an en Pologne. Ce chiffre tombe en dessous de 2000 depuis 2010 et continue de baisser. Toutefois, le Planning Familial polonais estime qu’environ 100 000 avortements clandestins sont pratiqués chaque année, sans compter ceux réalisés via le tourisme médical, d’où la nécessité de préserver la légalité de l’IVG.

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Diplômée d’une licence d’Anglais et d’un master de Journalisme axé sur l’audiovisuel et le documentaire, Clémence retourne à ses premiers amours via Causons d’Europe : les lettres et les langues ! Si ses articles touchent à tous les domaines, elle reste persuadée que la vulgarisation des luttes féministes et queer permettra de sortir des débats stériles.
Au-delà de ça, elle traverse une crise existentielle, car elle ne peut plus aisément prendre le thé avec les britanniques depuis leur départ de l’UE, mais elle tient le coup … Et elle est toujours à la recherche de piges.