Le Conseil de l’Europe met en lumière les violences et le racisme de la police portugaise3 minutes de lecture

  Il n’y a pas qu’en France que la question des violences policières est au cœur de l’actualité, avec le vote de la loi sur la sécurité globale. Au Portugal, un rapport du Comité anti-torture du Conseil de l’Europe, rendu à la mi-novembre,  met en lumière les agissements de la police portugaise : « mauvais traitements » de tous genres, racisme et, bien entendu, impunité des agents à l’origine de ces agissements.

Que dit le rapport du Conseil de l’Europe ?

  Le rapport du Comité anti-torture du Conseil de l’Europe, long d’une cinquantaine de pages, est le fruit de la visite d’une délégation européenne au Portugal au mois de décembre 2019. De précédentes visites, notamment de délégations de l’ONU, avaient tiré des conclusions similaires.

  Selon ce rapport, les cas de mauvais traitements infligés par la police portugaise sont signalés particulièrement au cours des arrestations, y compris une fois les suspects menottés, et même lors des interrogatoires. Ils consisteraient en nombreuses « gifles, coups de poing et coups de pied », voire parfois l’usage d’objets contondants. Ces coups seraient aussi parfois un moyen d’obtenir des aveux et de leur faire signer des documents.

  Le Comité rapporte également que ces brutalités viseraient en plus forte proportion les personnes noires, qu’elles soient de nationalité portugaise ou étrangère. Celles-ci subiraient en plus des insultes discriminatoires liées à leur couleur de peau.

  Le rapport contient aussi plusieurs témoignages, sous couvert d’anonymat, de personnes arrêtées faisant état de tels traitements, dont certains sont confirmés par des rapports médicaux. Un témoin, que le rapport désigne par les lettres « JB », a été arrêté par la Polícia de Segurança Pública (équivalent portugais de la police nationale française) et amené dans un poste de police du quartier de Benfica à Lisbonne. Il affirme avoir été giflé et frappé par plusieurs agents pendant qu’il était assis sur une chaise, les mains menottées dans le dos. À son arrivée en détention, il a été examiné par des médecins qui affirment que ses blessures étaient compatibles avec les mauvais traitements décrits.

  Les conditions de détention en prison sont aussi abordées par le Comité anti-torture. Au-delà de témoignages supplémentaires de mauvais traitements, le rapport pointe aussi du doigt la surpopulation carcérale des prisons portugaises visitées. L’une des recommandations du rapport étant de ne pas placer plus d’un prisonnier dans les cellules de 7m², et d’assurer un minimum de 4m² par prisonnier dans le cas de cellules partagées.

La rue contre les violences et le racisme de la police

  Les éléments mis en lumière par le rapport du Comité anti-torture du Conseil de l’Europe n’ont pourtant rien d’inédit. Au Portugal cela fait plusieurs années que les affaires de violences policières, en particulier à l’encontre des personnes noires, se succèdent et mobilisent la rue.

 Ainsi en juin dernier, des milliers de personnes avaient manifesté dans les principales villes portugaises après l’assassinat de George Floyd par la police aux États-Unis. L’occasion pour elles de rappeler qu’au Portugal aussi,  la police est impliquée dans plusieurs affaires de violences racistes.

  En janvier 2020, l’arrestation de Cláudia Simões, une femme noire d’une quarantaine d’années, avait fait la une de l’actualité au Portugal. Une vidéo de son arrestation, longue de 7 minutes, puis une photographie de son visage tuméfié, avaient alors largement été partagées sur les réseaux sociaux, prouvant l’acharnement dont les agents de police avaient fait preuve.

 

  Si tout concorde pour pouvoir affirmer l’existence de violences et de racisme au sein des forces de l’ordre portugaises, la réponse institutionnelle pour répondre à ces dérives se fait attendre. En 2018, une autre instance du Conseil de l’Europe, la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance, avait déjà pointé du doigt l’existence de violences racistes dans la police portugaise. À l’époque, Eduardo Cabrita, le ministre de l’intérieur portugais, avait refusé de reconnaître l’existence même de violences racistes parmi ses subordonnés.

 

 

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